JE CAUSAIS, JE CAUSAIS, JE CAUSAIS…

« Je causais, je causais, je causais…
Mon cœur, qu’est-ce que tu disais? »

Les amis de la poétesse et spirituelle  Marie-Noël ont reconnu sa plume.
Nous bavardons. Nous soliloquons. Nous bruitons. Nous nous agitons en quête d’un vain silence intérieur.
Qui exprime quoi ?
Qui écoute qui ?
« Vous aviez l’air ailleurs » interroge la personne perspicace quand quelqu’un est fantôme de lui-même.
« Merci à toi d’être là » vient de m’écrire  quelqu’un dans un deuil pourtant vécu  à grande distance géographique.
Notons que Marie-Noël n’invoque pas son « petit cœur » sentimental et autocentré.
Elle interroge le cœur !
Le centre de gravité.
Le lieu de pleine noblesse et de vive fragilité.
Celui que Dieu sonde mieux que quiconque.
Celui que Dieu, d’infinie  grandeur,  habite étonnamment  dès que l’homme lui consent un début d’habitacle.
Le cœur, que disait-il?
Celui que la lassitude peut envahir.
Celui que l’ardeur nouvelle  cherche à embraser.
Celui qui est sujet d’un diagnostic fondamental : « c’est quelqu’un qui a du cœur…. Dans cet événement, le cœur n’y était pas…Nous sommes de grand cœur avec vous… »
La fine pointe de l’être.
Ce mystérieux « organe vital  » que la cardiopathie recense parmi les premières morbidités de l’humain.
Ce lieu de tant « d’hôtes » plus grands que soi : l’âme, l’esprit, l’amour…
Cet espace où s’exerce l’indicible préparation de pauvres paroles.
Ce havre tant cherché pour la prière.
« Et toi quand tu pries, retire toi »
Mon cœur, que disais tu ?

Avril est là.
Le temps Pascal nous est offert.
Il cohabite avec la nécessité de restrictives mesures sanitaires.
L’épreuve est donc identifiée.
Nous devons veiller  à la double tentation : soit être des illuminés indifférents aux événements, soit désabusés comme si nous n’avions pas d’espérance.
Ne confondons pas la pâque et la morosité.
Certes, nous habitons le réel et ne sommes rien sans lui.
Bien évidemment, nous sommes de plain-pied avec les ombres et lumières de la crise.
Mais pas pour ajouter du noir au gris.
Dépositaires  du message Pascal, nous ne planons pas.
Mais recevons  la grâce de souffrir avec celui qui souffre en étant communicatifs de l’élan divin né du grand abime du Samedi saint entre tous.
Marie-Noël a bien vu.
C’est du cœur que tout vient et tout arrive en sa nouveauté d’évangile.
« Le cœur doit parler au cœur » clameront Saint François de Sales et Saint Newman, brûlants de la personne de Jésus pour les destinataires de leur temps.
Marie-Noel est aussi une personne très concrète :
« Je cousais, je cousais, je cousais…
Mon cœur,  qu’est-ce que tu faisais ? »
Que ce soit dans la grandeur des jours ou dans la plus concrète des tâches, le cœur que notre Bien Aimé habite est sans cesse sollicité.
« Thomas, mets ta main en mon côté.
Cesse d’être incrédule. Consens à devenir croyant ! »
Dans l’agir, dans le penser, dans le croire, dans l’aimer, « Mon Seigneur et mon Dieu ». De Thomas l’incrédule, monte ce cri dont les exégètes diront
« Il n’en est pas un qui dise mieux la divinité du Ressuscité »

Pâques 2021. Printemps tout en contrastes d’inquiétudes et de lueurs.
La troisième vague est notre lot des semaines à venir.
Ne baissons pas les bras.
Ne diminuons pas la vigilance.
Veillons surtout sur notre cœur.
Que ne le gangrène pas le Tentateur.
Le rabat joie de Pâques.
Celui qui divisa Judas
Le Malin qui fermerait nos yeux à la détresse du frère.
Le Sournois qui ronge la persévérance tant attendue.
En Jésus mort et ressuscité, dit l’Epitre, nous avons « la preuve que Dieu nous aime ».
Parmi tant d’incertitudes, cette preuve du grand Amour ne sera  jamais dérobée à l’homme qui veut y ouvrir son cœur.
Que se propage la flamme en nous et au contact de nous. Christ est ressuscité !
Saint Temps pascal à vos personnes, vos familles  et  communautés !

Mgr Bernard Podvin
Missionnaire de la Miséricorde