Différents mais ensemble

À l’invitation du Groupe de réflexion inter-religieux et culturel d’accueil des migrants (GRIAM), nous nous sommes retrouvés, membres de diverses confessions religieuses de la métropole lilloise, pour réfléchir à propos de la promulgation de la nouvelle loi sur l’immigration en date du 26 janvier 2024.

Une loi, symptôme d’une situation globale qui se détériore

À nos yeux, cette loi est un écho de plusieurs mouvements d’idées dans notre monde occidental d’aujourd’hui :

• Un durcissement des relations humaines qui marque notre société et notre manière de vivre et qui ne cesse de s’aggraver, signe d’une perte de confiance entre les personnes …
• Les guerres (celles dont on parle et celles qu’on ignore) qui ensanglantent plusieurs pays du monde et entretiennent cette impression de violence généralisée.
• Dans l’imaginaire collectif universel, la France reste “le pays des droits de l’homme’’. Mais aujourd’hui les difficultés de la vie poussent beaucoup à une attitude d’indifférence, de cynisme et de repli sur soi.

Les migrants sont alors perçus comme une source supplémentaire de difficultés alors que l’immigration est avant tout un drame, celui d’hommes et de femmes en recherche d’un peu plus d’humanité et qui, finalement, ne trouvent souvent que le rejet.

À nos yeux, être “immigré” n’est pas une identité. Derrière ce mot, il y a d’abord un homme ou une femme, avec son histoire, ses relations humaines, ses capacités, ses sentiments, ses idéaux… On n’enferme pas quelqu’un dans une “carte d’identité ou de séjour”.

Une nouvelle loi immigration

Cette nouvelle loi sur l’immigration (la 20^ème en 40 ans) ne fait qu’accumuler et durcir les obstacles à l’accueil et à l’intégration. Un exemple particulier de ce durcissement est la question de la langue : la langue, outil essentiel de communication entre humains – et, pour ce qui est du français, symboliquement reconnu comme outil de communication international – devient, à cause des exigences de maitrise du français que cette nouvelle loi durcit, un outil de discrimination et d’expulsion (particulièrement pour les femmes) …

Nos convictions :

+Pays où est née la “déclaration des droits de l’homme”, la France a, dans sa devise, le beau mot de Fraternité. Nous aimons rappeler que cette déclaration est une “déclaration universelle” et qu’en conséquence, il n’y a pas d’étrangers sur cette terre.

+Dans notre partage inter-religieux, nous nous sommes souvenus, en référence à notre patriarche commun Abraham, que notre patrimoine religieux nous invite à aimer l’étranger comme un frère.

+Nous savons tous, en particulier dans nos Hauts de France, que, “première, deuxième, troisième génération, nous sommes tous des enfants d’immigrés”… Et nous savons ce qu’ils ont apporté à notre région.

+En dépit de tous ces obstacles, nous constatons des gestes de solidarité et de fraternité, (associations, accueil de jeunes migrants, cercles de silence…)

Il ne s’agit pas d’être optimistes ou pessimistes, mais “déterminés” :

Voulons-nous choisir une société où l’autre est perçu comme un ennemi ou voulons-nous nous impliquer dans un vivre ensemble ?

Les prochaines élections européennes nous invitent à répondre à cette question.

Lille le 18 avril 2024

Signataires :

• De l’Église Protestante Unie de France

Jan Albert Roetman, Église protestante unie de Lille

Béni Rasolomoromalaza, Église protestante unie de Lille

Olivier Gerhard, Église protestante unie de Fives

Yves Quétin, Église protestante unie de Lille

• De l’Église catholique

Jean-Hubert Vigneau, prêtre, Mission ouvrière

Maxime Leroy, prêtre, Mission Ouvrière

Ange-Marie Amoureux, GRIAM, ACO Mission ouvrière

Bruno Cadez, délégué diocésain à la Mission ouvrière pour le diocèse de Lille.

Jean-Marie Dumortier, GRIAM

Pascal Dame, Service du dialogue interreligieux du diocèse de Lille

Clarisse Madimba, responsable de la Pastorale des migrants du diocèse de Lille ;

Régis Bigo, Petit Frère de Jésus (Charles de Foucauld), GRIAM

Marc Hayet, Petit Frère de Jésus (Charles de Foucauld), GRIAM