Billet du père Podvin mai 2021

UNE CARTE DE FIDÉLITÉ ?

Quel est le commerçant qui, en ce moment,
ne vous demande si la carte de fidélité de son établissement vous intéresse ?
Contexte particulier  compréhensible. Un énorme défi est à affronter pour tant et tant d’enseignes : fidéliser à nouveau une relation que les confinements ont distendue.
Reconstituer peu à peu les réseaux.
Tant et tant d’activités humaines sont en attente. La pastorale également en est  là !
Sans chercher à jouer sur les mots, qu’en est-il du « fidèle du Christ » que nous avons la joie d’être et devenir ?
Qu’est-il advenu des visages qui nous étaient familiers avant que ne se déclenche la Covid? Qu’avons-nous fait de nos frères ?
Quelle humble fidélité s’inscrit de notre part en réponse à  l’indéfectible amour prodigué par Dieu?
« Tu es le Dieu fidèle, éternellement » chantons nous de chœur et de cœur.
Si le chrétien détenait une quelconque « carte de fidélité » n’est-ce pas du Christ, et de Lui seul, qu’il recevrait la source et  le discernement authentique?
Le bienheureux Joseph Cassant avait bien compris, depuis son monastère toulousain, l’enjeu spirituel de ne pas se faire comptable de soi-même. « C’est l’amour qui fait la grandeur de nos mérites !  » écrit-il à ses proches, dont le labeur quotidien écrasant pouvait transformer leur réelle dévotion en «négociation » avec le ciel.

La Pentecôte nous est offerte bientôt.
Invoquons  le Saint Esprit pour qu’il ravive en nous ce qui correspond au désir du Père.
C’est la priorité. C’est la vocation indicible de tout membre de l’Eglise.

Le théologien Karl Rahner, dans une admirable prière, situe la grâce primordiale de notre être dans le don baptismal :
« Lors du baptême, Père, tu as prononcé ta Parole à travers mon être. Parole en qui seulement est la Vie. Dieu de la grâce devenue mon expérience! ». Rahner, s’étant émerveillé de ce don, implore le Seigneur : « Retentis en moi de façon toujours plus audible, Parole du Père, Parole de l’Amour Jésus ». Ayant fait à Dieu cette demande pour chaque jour,  Rahner voit alors combien tout ce déploiement mène l’homme à la jubilation de l’amour : « Quand dans la mort, tout fera silence et que seront achevés mon apprentissage et ma souffrance, alors toutes les paroles humaines se seront tues. Je connaîtrai comme je suis connu. Je comprendrai ce que tu m’as toujours dit : toi-même! ».
Je vous souhaite une Pentecôte où l’Esprit vous donne l’ardeur à reconstruire, relancer, retisser les réseaux… Oui bien sûr, ce dynamisme nécessaire, mais avec toujours deux repères vitaux à ne pas perdre de vue : ne rien entreprendre sans une extrême attention envers « le plus petit d’entre nos  frères ». Et ne rien construire  qui ne soit intensément prié, comme Rahner, en puisant à l’Esprit « qui  désire emplir tous les espaces de notre âme ».
Sainte et joyeuse Pentecôte à vos personnes, à vos diverses relations et appartenances!

Mgr Bernard Podvin
Missionnaire de la Miséricorde.