LA MYRRHE EN 2021

LA MYRRHE EN 2021 !

De l’or, de l’encens, de la myrrhe. Tels étaient les présents des mages relatés par l’évangile de Mathieu. (Chap 2)
On pourrait avoir une réaction spontanée : « En plein marasme comme celui que nous traversons, n’y a-t-il pas sujet d’éditorial plus adéquat? »
Si l’on ne voit là que cadeaux circonstanciés, évidemment !
Mais, comme dit Benoit XVI, si on les lie à la proskynesis des mages, c’est à dire au fait qu’ils se prosternent, les présents prennent alors  signification lumineuse, non plus en eux-mêmes mais référés à Celui à qui l’hommage est décerné.
Là est bien leur actualité à travers les siècles ! Ils sont pour le Christ. Ils nous éclairent sur qui est Jésus pour le monde.
La grandeur de Dieu s’étant faite vulnérabilité à Bethléem, la visite des Mages offre toute grandeur à cette vulnérabilité.
Dans les trois dons, l’Eglise discernera,  au fil des siècles et avec quelques variantes, l’or d’une royauté nouvelle, l’encens d’une divinité incarnée, la myrrhe d’une Passion source de salut.
Le mystère du Christ suscitera l’encens de notre foi, la myrrhe de notre espérance, l’or de notre charité.
L’éditorial pour l’an nouveau n’aura donc rien de désuet : l’or de Bethleem appellera notre énergie à ne pas placer notre puissance dans l’illusoire ou le fratricide. L’encens de Bethleem appellera notre prière à se renouveler dans la ferveur et la profondeur. La myrrhe de Bethleem appellera notre attention envers l’autre à être semblable à une véritable  onction.
Qui est grand, qui est petit aux yeux des hommes et sous le regard de Dieu ?
La visite des mages renverse les codes mondains.
Non seulement les présents sont étonnamment destinés à un enfant, mais les voici universalisés envers tout homme fragile  que Dieu aime.
Ces présents précieux qui devraient être privilèges des forts sont hommage envers le plus infime.
Comme dit le Pape François : « Dieu ne parvient pas à ne pas nous aimer ! »
Allons plus loin,  jusqu’où l’Epiphanie veut nous mener. C’est à dire au-delà de toute frontière : les dons des mages, si sublimes soient-ils, seront comme dépassés par l’ineffable divinité de  leur récipiendaire. La myrrhe, par exemple. Quand Nicodème  viendra pour l’onction du corps de Jésus (Jean 19), il n’apportera pas moins de cent livres de myrrhe et d’aloès ! Disproportion étonnante. Cent livres… Signe du dépassement devant la grandeur de  Celui qui est à oindre. Son corps  ne peut connaître la corruption. « Le geste de l’onction veut rituellement s’opposer à la corruption définitive du défunt. Or, le Ressuscité n’aura plus besoin de cette myrrhe, la vie même de Dieu ayant vaincu la mort » précisent les  exégètes.
Chers amis, bousculés (ce qui est euphémique!) par les véritables secousses tectoniques de 2020, nous entrons si prudemment en 2021…
2020 nous a tellement retournés.
On comprend nos appréhensions, nos inquiétudes, nos atermoiements, nos lassitudes, nos colères.
Entrons cependant en l’an nouveau autrement que par la superstitieuse peur de n’oser rien se souhaiter « qui donnerait la poisse ».
Entrons en 2021, porteurs de myrrhe ! Cette marque d’attention venue des mages.
Onction envers tous ceux que la vie éprouve. Fraternité offerte. Mains ouvertes de notre disponibilité à les rejoindre, les écouter, soigner leurs blessures.
« Prenez  soin de vous  » est devenu une formule incroyablement usitée.
Ce souhait prend évidemment  toute pertinence quand sévit une pandémie.
Il doit s’étendre à tout ce que le soin comporte,  et que la myrrhe signifie plus amplement encore. Le soin de tout l’être !
Bien plus encore  que ce que tout « Care » peut contenir. Mais commençant aussi par la simplicité, du premier des gestes d’amitié.
Vœux sincères à vous tous, en vos familles et vos communautés !
Nous ne savons ce que demain sera ?
Mais nous croyons que l’Amour nous y accompagne! Dieu  prend soin de nous et nous presse de prendre soin les uns des autres, corps et âme ! Par centaines de livres, comme par la plus modeste des pincées, que la myrrhe des mages, myrrhe de Nicodème soit généreuse et espérante entre nous.
Sainte année 2021 !

Mgr Bernard Podvin
Missionnaire de la Miséricorde