À ceux et celles qui travaillent dans l’Enseignement catholique

Chers amis,

C’est toujours un beau rendez-vous que ce jour de rentrée où nous sommes plusieurs centaines à nous retrouver, après le nécessaire repos et le changement d’horizon estival, pour faire de nouveaux projets et reprendre ensemble la mission éducative que nous aimons.

Nous déclinons pour la troisième année consécutive le thème : une école, promesse d’@venir. Après l’attention portée sur les jeunes eux-mêmes qui sont la raison d’être de l’éducation et de l’Enseignement catholique, puis sur les intervenants dans nos établissements, situés en accompagnants de la croissance des jeunes, c’est l’institution de l’école elle-même qui constitue la thématique principale pour l’année qui commence : l’école, un bien commun à fortifier, au service du jeune en croissance.

Nous partons de la conviction commune que l’école catholique est d’abord une école. Ce que nous avons à proposer doit répondre à son objet qui est universel. L’école catholique participe à la mission éducative des jeunes considérés comme des personnes à faire grandir pour qu’ils trouvent leur place dans une société à construire sur les bases de la justice et du respect. Voilà pourquoi, en tout lieu, l’école catholique est légitime à faire sa propre proposition éducative : on trouve des écoles catholiques dans le monde entier, même dans des pays où la religion chrétienne est peu implantée. Là, les établissements catholiques d’enseignement reçoivent une grande majorité d’élèves non baptisés, non chrétiens, et même non informés du message évangélique. Dès lors, ceux qui portent le projet de l’école catholique, animés de leur foi et du désir d’agir en conformité avec la mission d’annonce de l’évangile, s’efforcent-ils de former des jeunes dans la société où ils se trouvent, pour qu’ils deviennent des hommes et des femmes responsables, honnêtes, désireux de servir et de promouvoir une société juste.

C’est le premier bien commun que nous servons, sans prosélytisme. C’est bien ce que nous disons lorsque nous explicitons le projet de l’Enseignement catholique : accueillir tout le monde, toutes les familles qui souhaitent venir chez nous et ne s’opposent pas à la conception chrétienne de l’homme qui nous anime. C’est la demande de l’évangile de ne pas faire de discrimination ; et c’est ce que demande aussi la loi française qui, en même temps, reconnaît notre caractère propre. Nous ne restons pas entre nous, nous acceptons – et mieux peut-être encore nous désirons nous trouver avec des personnes, des familles qui ne partagent pas la foi chrétienne, mais savent qu’elle était dans le projet fondateur des établissements, et qu’elle y est toujours.

Nous servons encore le bien commun d’une autre façon, sans cacher la source de notre conception chrétienne de l’homme. Avec la liberté qui nous est reconnue de pouvoir rendre visible et audible dans nos établissements l’évangile du Christ. Ce n’est pas une concession, nous avons vraiment la liberté de faire comprendre de qui nous vient la passion d’éduquer, de Celui qui donne tout et se donne Lui-même pour que les hommes aient la vie et la vie en abondance (évangile de Jean 10, 10).

Et nous avons la possibilité encore de faire vivre au milieu de nos établissements des groupes de chrétiens, qui sont des composantes de la communauté chrétienne, de l’Église. Dans un établissement scolaire catholique, l’Église peut être rendue visible par les paroles que l’on dit, ou par les attitudes déployées au service de la croissance des jeunes ou des acteurs. Elle se manifeste aussi par des groupes, y compris de personnels et d’enseignants, qui se réunissent en son nom, par des assemblées lors de célébrations que l’on y vit de temps en temps.

C’est bien cela qu’on appelle la pastorale, le projet pastoral de l’Enseignement catholique. Il ne se limite pas à des projets humanitaires et caritatifs qui mobilisent au moment du Carême, ou à la catéchèse que l’on y dispense, il ne s’enferme pas dans des temps ou des lieux désignés. Il s’agit de toute la vie de l’établissement qui intègre l’accueil de tous – en reconnaissant que tous ne sont pas chrétiens et en respectant leur liberté de ne pas croire, ou de croire autrement –, développe le désir de rendre visible l’évangile du Christ et de permettre à ceux et celles qui l’accueillent d’en donner le témoignage. L’accueil de tous, l’annonce de l’évangile et la visibilité de groupes chrétiens : ces trois critères ne peuvent être séparés et font de cette école une pastorale.

Qui ne voit que la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui exige cette attitude ? Nous vivons dans un temps où demeurent beaucoup de signes de l’enracinement chrétien, mais où les références quotidiennes de beaucoup ne sont plus chrétiennes. Que ce soit l’habitude d’entrer dans une église non seulement pour la visiter mais aussi pour y prier, qu’il s’agisse de la culture minimale pour interpréter une œuvre artistique, ou de la prise en compte des principes éthiques sociaux, familiaux ou personnels, la marque chrétienne n’y est plus la référence principale. L’Enseignement catholique dès lors trouve ici la vocation de se présenter comme une part de « l’Église (qui) doit entrer en dialogue avec le monde dans lequel elle vit. L’Église se fait parole ; l’Église se fait message ; l’Église se fait conversation. »

Ainsi s’exprimait le saint pape Paul VI, au moment du Concile Vatican II (1962-1965), dans une lettre adressée au monde entier (encyclique Ecclesiam suam, n°67). Il demandait à l’Église et aux chrétiens d’entrer en permanence en dialogue avec les hommes et les femmes de notre temps ; et c’est encore plus nécessaire aujourd’hui qu’il y a 50 ans.

Ce n’est pas une intrusion dans la conscience des autres, mais c’est un véritable service du Bien commun que de ne pas cacher ce qui nous mobilise dans le projet éducatif. Nous écoutons le conseil de l’apôtre Pierre qui demandait aux chrétiens de la première génération : « Soyez toujours prêts à rendre compte à qui vous le demande de l’espérance qui est en vous ; mais que ce soit avec douceur et respect » (1ère lettre de Saint Pierre 3, 15-16).

Depuis trois ans, à la suite des recommandations préparées par le conseil presbytéral que je vous ai présentées à la rentrée 2016, beaucoup a été fait pour rapprocher des établissements scolaires catholiques avec les paroisses et communautés chrétiennes, dans le respect de la responsabilité propre des uns et des autres. (…) Et pour faire suite à ma demande de l’an dernier concernant la catéchèse – qui n’est donc qu’une part de la pastorale de l’établissement, de nouvelles perspectives s’ouvrent, et je souhaite que nous avancions encore.

Je vous souhaite une belle année, riche d’expériences pédagogiques, humaines, spirituelles. Soyez sûrs de mon amitié et de mon soutien. Que le Seigneur vous bénisse dans votre travail, dans l’œuvre éducative où vous vous investissez, dans votre vie personnelle, sociale et familiale.

† Laurent Ulrich, Président du conseil épiscopal de l’Enseignement catholique

Août 2020